HENRI PLANSON NOUS A QUITTES
Henri Planson vient de décéder, à Saint-Julien-les-Villas dans l’Aube le 23 août dernier, à l’âge de 88 ans.
Sa vie fut un éternel combat. Le fait qu’Henri soit le fils d’un certain Lucien Planson, n’est pas étranger à son parcours. Lucien qui mourut tragiquement en 1947 à Troyes et dans d’étranges circonstances, fut le fondateur du PCF dans l’Aube, militant à la CGTU, tout de suite après le Congrès de Tours en 1920, avec Doucet, Cuny, Plard, Romagon et Gennevois. Il est sûr que le jeune Henri avait en mémoire les récits des luttes qu’avait menées son père contre la guerre du Rif ou pour la libération de Sacco et Vanzetti dans les années 20. Il se souvenait aussi des périodes de prison que la justice bourgeoise lui avait infligées pour ses articles en faveur de la paix dans la Dépêche de l’Aube. Il faut aimer les délinquants qui violent les mauvaises lois. La désobéissance est dans ces cas-là un devoir civique. Cela ne pouvait que plaire à Henri. C’est donc Lucien, l’ouvrier bonnetier, qui « apprend » à son fils le syndicalisme, la politique et, puisque c’est l’époque, la Résistance. Mais sa mère, née Albertine Petitot, sera également un bel exemple d’affection, de solidarité et de militantisme.
Il est né en 1926 dans une famille de 7 enfants qui habite alors la Villeneuve-aux-Chênes au cœur de la forêt d’Orient. Il a donc 14 ans en 1940. Bien que les Planson sortent de plusieurs années d’oscillations politiques et syndicales, ils se retrouvent spontanément du côté de la Résistance FTPF. Henri s’inscrit dans ce mouvement. C’est donc un des plus jeunes militant de la Résistance, commençant vers 1941 par tracer des V de la victoire sur les murs, à l’appel de radio Londres, jeu cependant dangereux à l’époque. Ce V signifiait aussi « vorbei », disait Maurice Camuset, vorbei, une sorte de « fout le camp » à l’intention des occupants nazis.* Il s’exerce ensuite sur les croix de Lorraine et distribue journaux et tracts qui font circuler le sang des idées antivichystes et antinazies. Membre des milices patriotiques de la jeunesse en 1944, il reste aux côtés de son père (médaille de la Résistance) jusqu’à la Libération. Après la dissolution des milices patriotiques , Henri s’engage comme de nombreux Résistants pour continuer la lutte contre l’occupant et les collabos. Il est affecté au 106è RI puis muté au 131è qui ira libérer les « poches » de l’Atlantique . Il est blessé à la tête pendant les combats de La Rochelle. Il refuse d’être évacué et reprend la lutte à Royan puis à la Pointe de Grave ainsi qu’à l’île d’Oléron où il débarque le 1er mai 1945.
A la mort de son père en 1947, il revient à la vie civile, se sentant plus à l’aise dans le civil et dans la lutte politique en faveur de la paix. Il est embauché à la Sécu et fera toute sa carrière au service des familles. La vie d’Henri Planson sera dès lors une vie de militant en faveur des idées de la Résistance. Il visite collèges et lycées, adhère à l’ANACR dont il devient président aubois et membre du Bureau national. Il devient également secrétaire général de l’UDAC, entre autres engagements au Mouvement de la Paix dont il fut secrétaire départemental, dans le syndicalisme et dans la politique. Il sera élu conseiller municipal dans sa ville de Saint-Julien près deTroyes.
Henri était d’une grande modestie, restant discret sur ses engagements, sur l’héroïsme des ados de son âge dont il fut. Il avait acquis du fait des engagements de son père et des à-coups de la vie militante d’avant guerre, du fait également de ses lectures, de ses contacts politiques, syndicaux et associatifs, une grande culture et une sagesse politique et humaine qui le faisait respecter de tous. Grâce à sa compétence, son entière disponibilité, son inaliénable fraternité il faisait partie, dans son âge mûr, de cette vieille garde ardente et fidèle qu’il suffisait d’appeler pour qu’elle se mette au service des causes les plus justes et les plus nobles.
Jean Lefèvre
* Vorbeifahren : passer, circuler.